Par Vincent Rabouin
L’enfance de Nekfeu
De son vrai nom Ken Samaras, Nekfeu est un rappeur français, aux origines grecques et écossaises, né en 1990. Alors qu’il était encore jeune, ses parents décident de quitter le sud-est de la France pour aller s’installer à Paris. C’est dans cette ville que Ken effectuera ses études.
Son ascension vers le sommet
En ce qui a trait au début de sa carrière, on pourrait dire que celle-ci commence réellement en 2001, l’année à laquelle il forme le groupe de rap S-Crew avec des amis d’enfances. C’est en mettant en ligne quelques Freestyles, déjà très originaux et profonds pour l’époque, que Nekfeu verra donc son nom devenir de plus en plus connu du grand public. En effet, le titre dans Ta Réssoi, produit en 2011 par Nekfeu en collaboration avec Alpha Wann, tous deux membre du groupe 1995, représente très bien cette incroyable ascension vers le sommet du Rap game. Les chiffres ne mentent pas, près de 10 millions de clics totalisés à ce jour sur YouTube. Par ailleurs, son titre Égérie (2015), écrit pendant la préparation de son premier album, est autre preuve de cette montée. Celle-ci saura se faire une place parmi les cinquante meilleures ventes de titres en France.
Feu (2015)
C’est en date du 8 juin 2015, après un peu plus de deux ans d’écritures, que Nekfeu sortira son premier album intitulé Feu. C’est avec cet album, composé de 27 morceaux extrêmement bien travaillés que Nekfeu montre déjà au monde entier, que contrairement à bien d’autres artistes, il priorise la qualité plutôt que la quantité. C’est d’ailleurs majoritairement des thèmes tels que l’amour ainsi plusieurs messages à caractère politique que l’on retrouve surtout dans cet opus. C’est par des termes tels que « Princesse », « Égérie » ainsi que des références extrêmement poussées que le rappeur tente d’aborder plusieurs thématiques comme personne d’autre ne l’a fait au paravent. C’est sans parler des instrumentales, des paroles ou même des collaborations qui, disons-le, sont d’une qualité bien au-delà d’un premier album.
Cyborg (2016)
Il ne s’arrêtera pas là, bien au contraire. C’est par l’entremise d’une annonce surprise, lors d’un spectacle à Bercy en décembre 2016, que Ken annonça son deuxième album solo « Cyborg ». L’accueil de l’album sera phénoménal. Avec aujourd’hui près de 500 000 albums vendus, il bat le record de l’album français le plus écouté en 24 heures. Il est important de mentionner que l’album est, en date d’aujourd’hui, certifié triple disque de platine. Dans son second œuvre, Nekfeu n’a pas honte de parler de son lourd passé (Métro, vie virtuelle, drogue, amour, etc.). Mélangez à ça des revendications politiques extrêmement profondes et drôlement bien expliquées, ajoutez-y des instrumentales parfaitement adaptés ainsi qu’un soupçon de références culte et voilà, succès garantis ! Plus sérieusement, étant très loin d’être un analyste de musique, je dois avouer que c’est un album que j’ai énormément apprécié, dû à la richesse des textes ainsi que la diversité de ceux-ci. Cela peut paraître anodin, mais même encore aujourd’hui, après avoir beaucoup écouté ces musiques, il m’arrive encore de comprendre certaines références que je n’avais jamais comprises au paravent, ce qui est malheureusement trop rare dans le rap contemporain.
Étoiles vagabondes
Toutefois, pendant l’écriture de son dernier album, le Fenek a fait face à de nombreuses difficultés. « Parfois, il faut fuir la frénésie des grandes villes, pour se rendre compte à quel point on s’est habitué à cette folie quotidienne. » Dans ce passage provenant du film Étoiles vagabondes on comprend que le rappeur ressent le besoin de quitter Paris, là où il se sentait, depuis un certain temps déjà, piégé avec ses problèmes. De là viennent ses difficultés à écrire. C’est d’ailleurs à cela que fait référence le titre de sa chanson Takotsubo (Syndrome de cœur brisé par le stress et les doutes). Il n’arrivait pas à écrire pour son album. Il ne savait pas par où commencer. Contrairement à beaucoup d’autres artistes, Nekfeu, dans son album les Étoiles vagabondes, met de l’avant des facettes de sa vie privée. Il démontre, par le biais de nombreux écrits, que derrière le rappeur, se cache une personne très empathique et affectée par de nombreux enjeux actuels, tels que le racisme, le sexisme, l’homophobie et même la brutalité policière : « Un p’tit Arabe qui fait des bêtises c’est un voyou pour la France un p’tit Noir c’est pareil, mais quand c’est un p’tit Blanc, c’est juste un chenapan » il arrive à se mettre à la place de beaucoup de minorités, qu’elles soient sexuelles ou raciales, sans pour autant tomber dans les préjugés. Ainsi, il explique que c’est cette même empathie qui l’a rendu profondément triste et sensible. C’est l’empathie, mais aussi sa célébrité qui ne lui amène que des relations toxiques. Entre les labels qui ne l’approchent que pour l’argent et les rappeurs qui jouent des rôles sans avoir de réelles convictions, Ken se sent seul : « Aujourd’hui j’ai joué devant 80 000 personnes, et je ne me suis jamais senti aussi seul. » En d’autres mots, dans Étoiles vagabondes, il a décidé d’aller beaucoup plus loin. Il connait maintenant son impact et il profite de sa portée pour défendre des causes qui lui sont chères. Donc, pour se ressourcer, il décidera de partir en voyage : Japon, États-Unis et Grèce. C’est en voyageant dans des milieux plus pauvres, dans lesquelles les gens font face à des tragédies que Nekfeu s’est rendu compte qu’il y a bien pire : « Il faut que j’arrête de me plaindre y’a tellement pire dans ce bas monde des malheurs y’en a plein des coups, j’en ai pris, mais j’suis pas mort ». Dans les trois destinations, il tentera d’utiliser la beauté musicale que l’on peut retrouver dans les autres cultures pour enrichir sa musique.