L’altruisme efficace par Hugo Girard
Vous venez de payer vos factures et vous remarquez qu’il vous reste de l’argent. Vous pourriez l’utiliser pour vous acheter de nouveaux jeux vidéos, livres, vêtements ou pour vous payer du restaurant, mais vous pensez aux gens dans la misère et il vous prend soudainement l’envie de faire un geste altruiste pour ceux qui ont, selon vous, plus besoin de cet argent que vous.
Le problème ; comment choisir à qui donner cet argent ? Il existe des millions d’œuvres de charité dans le monde, dont plus de 100 000 rien qu’au Canada[1]. Même si vous avez un objectif précis en tête tel que la lutte contre la faim, comment déterminer l’œuvre de charité contre la faim à choisir ? Certaines œuvres de charité ont un impact cent fois plus important que d’autres, et il serait dommage que le potentiel de votre argent ne soit pas exploité au maximum pour la cause qui vous tient à cœur.
Il existe quelque chose qui pourrait ici vous aider à vous orienter ; l’altruisme efficace. Il s’agit d’un mouvement philosophique et social qui défend que l’altruisme devrait être réfléchi de manière à maximiser son impact. C’est aussi un domaine de recherche qui vise à trouver les meilleures façons d’aider les autres.
L’altruisme efficace souligne plusieurs points intéressants auxquels on ne pense pas forcément concernant la charité.
Premièrement, tous les problèmes n’ont pas la même portée. On peut être touché par les enfants qui n’ont pas de cadeaux à Noël, mais il faut garder en tête que l’argent qu’on donne à une œuvre de charité qui fournit des cadeaux aux enfants pauvres à Noël pourrait être donné à une œuvre de charité qui pourrait, avec cet argent, acheter des dizaines de moustiquaires pour protéger les enfants de la malaria.
Deuxièmement, l’argent peut produire un plus gros impact lorsqu’il est donné à la lutte contre un problème plus petit. Le cancer est par exemple certainement un gros problème, mais faire une avancée dans les traitements contre le cancer peut demander une somme énorme, là où la lutte contre une maladie qui touche moins de personnes pourrait produire de grandes avancées avec une somme beaucoup plus petite parce que la recherche médicale sur cette maladie est maigre.
Troisièmement, la meilleure façon d’atteindre un but n’est pas forcément celui qu’on imagine. Si l’on veut participer à l’amélioration de l’éducation des pays défavorisés, on pense intuitivement à faire des dons à des œuvres de charité qui achètent des livres scolaires, mais la recherche a montré que financer la médecine et la nourriture de ces pays est beaucoup plus efficace ; un enfant bien nourri et en santé est plus disposé à assister aux cours.
Quatrièmement, il existe de nombreux problèmes dont la cause n’est pas un manque de ressources, mais la loi en elle-même. Par exemple, des milliers de personnes en agonie pourraient être aidées si la loi était moins dure sur le suicide assisté. Pour ces cas, il existe des œuvres de charité (comme Dying With Dignity Canada qui défend le droit à mourir) qui font des campagnes de sensibilisation ainsi que de la pression politique.
Il existe plusieurs outils et ressources créés par des organisations de l’altruisme efficace permettant d’aider à déterminer à quelles œuvres de charité donner son argent. Un des outils les plus intéressants sont les évaluateurs d’œuvres de charité parmi lesquels on retrouve GiveWell, une organisation à but non lucratif qui, entre autres, évalue de façon très rigoureuse le rapport « coût-impact » de nombreuses œuvres de charité.
GiveWell recommande plusieurs œuvres de charité, mais on peut citer Helen Keller International, une organisation qui distribue des compléments en vitamine A en Afrique subsaharienne. Il est estimé que chaque 4000$ donné à Helen Keller International permet de sauver une vie[2].
Un sujet important chez l’altruisme efficace auquel le grand public pense moins est celui de la souffrance animale. Dans le monde, 1400 milliards d’animaux sont abattus chaque année, ce n’est donc pas étonnant que l’altruisme efficace considère ce secteur comme méritant une grande attention et ayant un grand potentiel d’impact.
Un bon évaluateur d’œuvres de charité est Animal Charity Evaluator. Parmi les œuvres de charité qu’il recommande, on retrouve The Humane League, une organisation qui cherche à améliorer les normes de bien-être animal. Spécifier le rapport « coût-impact » de The Humane League est compliqué puisqu’il finance de nombreuses campagnes différentes, mais Animal Charity Evaluator a estimé que chaque 1$ donné à The Humane League permet environ d’épargner à 13-14 animaux 4 mois d’élevage industriel[3]. C’est un impact gigantesque.
Sources
- https://sectorsource.ca/research-and-impact/sector-impact
- https://www.givewell.org/charities/helen-keller-international
- https://animalcharityevaluators.org/blog/some-thoughts-on-our-cost-effectiveness-estimates/