Par Augustin Lévesque-Mongrain
Depuis hier, quelque chose de bizarre se passe, je peux penser. Cette capacité, pourtant donnée à tout le monde m’a été si soudainement enlevée. Je ne sais pas qui je suis, ni même où je suis. Entre ces quatre murs beiges, il y a des personnes qui viennent me voir pour me parler comme si j’étais un enfant. Pourtant, ma peau est ridée et mon insignifiante vie tire à sa fin. Je revois sans cesse mon père qui travaille dans le champ, accompagné de mes frères qui sont occupés à faire je ne sais quoi. C’est le seul souvenir de mon ancienne vie. Tout est flou dans ma tête. Au travers de ces murs lugubres, il y a un carreau de fenêtre. Je n’ai cessé de le regarder depuis hier, le spectacle qu’il m’offre est fascinant. Il y a de beaux et grands bouleaux, des érables d’une splendeur inimaginable. Cependant, il y a quelques éléments que ma fenêtre me permet de voir qui me sont totalement inconnus. Il y a des machines sur quatre roues qui transportent des individus et aussi, chaque heure, il y a une gigantesque machine à vapeur qui passe devant moi. Tout cela m’impressionne beaucoup. Visiblement, la civilisation a évolué depuis le 19e siècle.
Sans le moindre bonjour, un homme dans la cinquantaine rentre dans ma chambre. Sa présence m’extirpe de mes pensées. Il porte un habit bleu et, accroché à son chandail, il y a une petite plaquette avec un nom. Jordan. Cet homme se dirige vers le bout de mon lit sans me saluer. Quelque peu offusqué, je lui dis : C’est dans votre habitude de ne pas saluer les gens, mon cher Jordan ? L’homme lève la tête subitement, dans ses yeux imbibés de sang, je vois un grand étonnement. Il laisse tomber le cartable qu’il a dans ses mains, la bouche béante, il réussit à chuchoter quelque chose, il fait quelques pas de côté vers la porte et tout en me fixant, il passe le cadre de porte et il s’enfonce dans le corridor.
Dès qu’il quitte la pièce, je l’entends dire : le patient de la chambre 903 vient de me parler, que se passe-t-il ? Ce sont les derniers mots que j’ai entendus venant de sa bouche. Je commence à paniquer, les questions pullulent dans ma tête. Sans que je n’aille pu trouver réponse à mes questionnements, plusieurs hommes en sarrau blanc se jettent sur moi et me piquent sauvagement avec une longue aiguille. Je me sens faiblir…
À suivre